Sur le chemin de l’acceptation.
À la fin de l’année 2015, je pouvais me féliciter d’avoir laissé s’exprimer la tristesse avec laquelle je collaborais depuis 2012. Le temps associé à l’art cathartique avaient fait leur œuvre. Quelques mois après ma dernière exposition intitulée Fantasmagorie (voir les précédents articles), je ressentais à nouveau le besoin de m’exprimer. Le travail de guérison n’était donc pas terminé.
C’est à l’automne que j’ai commencé à réfléchir sur de nouvelles idées qui semblaient se regrouper entre elles : La femme sera une fois encore au centre de mes idées. Et comme pour chaque mise en scène que j’ai imaginée, je n’étais consciente que de la moitié de ce que je voulais exprimer. Je maîtrisais la surface mais je n’essayais pas de comprendre le noyau des thèmes que je voulais aborder. Je ne me rendais pas compte de tout le chemin que j’avais traversé tandis que mon âme, elle, criait à la considération.
J’ai mis un certain temps à comprendre ma véritable intention quant à mon projet photographique “Saintes”, et c’était bien comme ça, car cela m’a permis d’écouter mon intuition et non mon mental. Je voulais mettre à l’honneur certaines figures emblématiques, dont chacune d’elles portaient la croix de leur souffrance. J’ai essayé de comprendre leurs émotions face à leur destin, leur combat, leur colère comme s’il était question de moi.
C’est alors qu’après ces années d’exutoires émotionnelles, je commençais sans le savoir un travail d’analyse psychologique. Mes réflexions quant à ces photographies seront très analytiques dans un premier temps, puisque l’intention derrière mon projet Saintes est beaucoup plus subtil que mes projets Aranéisme et Fantasmagorie.
“Une existence exemplaire se paye parfois avec une vie de souffrance” Texte explicatif pour l’exposition en 2016.
J’ai commencé ma série avec notre très chère sainte Jeanne.
Jeanne d’arc, née en 1412, est morte sur le bûcher le 30 Mai 1481 à Rouen. Elle est l’héroïne de l’histoire de France, chef de guerre surnommée depuis le 15ème siècle la Pucelle d’Orléans et depuis le 19ème siècle, la Mère de la nation française. Canonisée en 1920, elle deviendra le symbole de la liberté et du nationalisme français, héritière malgré elle de l’emblème de la nation.
Pourquoi ai-je souhaité lui rendre hommage ?
J’ai puisé mon inspiration lors des événements particuliers qui ont touché le peuple français il y a 8 ans. L’attentat de Charlie hebdo avait donné le ton sur ce qui nous attendait par la suite en cette année 2015. Nos valeurs avaient été attaquées puis réappropriées par ceux qui s’agrippaient aux symboles de notre pays, plus que par l’émotion qui traversait nos cœurs de français. Un poids trop lourd à porter pour notre héroïne dont j’ai décidé de faire parler, suivant librement ma propre critique.
La première photo intitulée “de symboles il ne reste que pantins” représente Jeanne portant dans ses bras un très jeune garçon inconscient. J’en profite pour saluer le travail de mon amie maquilleuse et modèle Sophie Moutier qui pour l’occasion s’est transformée en la pucelle d’Orléans. Les pieds de Jeanne sont volontairement maquillés pour reproduire les brûlures et donc la souffrance qu’elle a enduré pour les français. Le petit garçon qu’elle porte est une allégorie de notre peuple, que j’ai souhaité figurer sous les traits de Gavroche dans les Misérables de Victor Hugo, lorsqu’il récite “Je suis tombé par terre, c’est la faute à Voltaire, le nez dans le ruisseau, c’est la faute à”…avant qu’il ne se fasse tuer, avant que Jeanne le prenne dans ses bras.
Sur d’autres photos Jeanne pleure, puis se place au milieu de ceux qui l’idolâtre, souffrant toujours d’évènements auxquels notre pays doit faire face. Ses ailes d’anges en forme de drapeau tricolore en sont abîmées.
Je sais que mon intention avait pris un chemin politique et que le sujet qui était à l’époque tout juste frais, pouvait blesser ou simplement agacer. Mais je savais ce que je faisais et je n’avais pas peur de tutoyer la provocation.
Et moi dans tout ça ? Où me situais-je dans ces photographies ? Et pourquoi est-ce que cela me passionnait ?
Si je devais donner la parole à Jeanne, elle me dirait “regarde le poids de tes blessures et regarde comment elles t’ont abîmée. Prend conscience de leur présence et rend leur hommage avant de les laisser s’en aller”.
Je vous laisse découvrir la vidéo backstage du shooting Jeanne, réalisé par Yannis Cacaux.
La suite dans la prochaine partie de Saintes…
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