Aranéisme (partie 2)

Aranéisme (partie 2)

Pour comprendre cet article, je vous invite à lire la première partie d’Aranéisme si ce n’est pas fait : https://lesmotsnus.com/araneisme-partie-1/

Les années 2013 et 2014  ont été les années de mon propre exorcisme. 

Photos, peintures, poèmes et vidéos m’ont servi d’exutoire. J’avais besoin de figurer ma blessure, mais toujours d’une manière détournée. Aujourd’hui je me demande qui je cherchais réellement à préserver ? Le public ou moi ? 

La vérité est que j’étais piégée dans ce tourbillon de colère enfouie et que je n’avais pas le recul nécessaire pour m’exprimer autrement qu’en le figurant. C’était trop violent, trop frais. Je me souviens aussi de la solitude dans laquelle je vivais cette douleur et qu’il m’était difficile de partager, pensant ne pas être comprise. D’autant que le cœur de cette blessure, ne m’était pas encore révélé. Ce n’est que récemment, que j’ai compris qu’il s’agissait d’une réponse quant à cette critique qu’on m’avait faite (voir article “le soigneur). J’avais décidé de sortir de moi la veuve noire, l’araignée à laquelle je m’étais identifiée. Et aussi surprenant que cela puisse paraître, je n’imaginais pas à quel point celle-ci se représentait dans mon expression. Notamment dans cette vidéo que j’ai réalisé avec l’aide de Yannis Cacaux sur la musique de Life’s Decay “Eabelia”. 

Près de 10 ans plus tard, mon analyse a pris beaucoup de hauteur depuis la réalisation de ce clip. 

“Du blanc au rouge” titre de cette création vidéo que vous pouvez retrouver en fin de page.

 

Que pensais-je raconter dans cette mise en scène ?

La réponse est évidente, il s’agissait de ce que je ressentais, comme tout ce que je manifestais à travers mes créations. Mais c’est Clémentine Renvoisé, elle-même artiste peintre, qui a interprété mon rôle. 

La vidéo commence sur un plan où on voit cette artiste au milieu d’un espace abandonné, faisant la copie d’un tableau d’Hippolyte Flandrin, “le jeune homme nu assis au bord de la mer”. On la voit très concentrée sur sa tâche mais perd peu à peu patience et finit par massacrer sa copie en lui jetant de la peinture rouge. 

 

Photo backstage du clip Du blanc au rouge, par Guillaume Duprey

Assise par terre, elle décide de se calmer en usant de substances dont on comprend non sans mal la nature. Arrive par la suite, une étrange créature (un fantôme ou une ombre) qui vient rôder autour d’elle et semble lui chuchoter des messages. C’est alors que l’artiste, soudainement influencée par cette ombre, se relève et attrape une toile vierge qu’elle vient poser sur le sol. Elle prend ensuite un grand pinceau et le plonge dans un pot de peinture rouge vif qu’elle va étaler sur toute la surface de la toile. La caméra fait un plan sur ses yeux qui sont eux aussi, devenus rouges. Puis, on la voit utiliser de la peinture noire pour dessiner avec ses doigts un tourbillon au centre du tableau. L’artiste semble être possédée par une rage qu’elle jette par couche de peinture sur l’ensemble de son œuvre.

La scène se termine sur un plan où on voit la jeune femme face à sa colère (le tableau) qu’elle regarde encore sonnée par sa délivrance, se faisant enlacer par l’ombre.

 

Photo backstage par David Lecomte

Comment l’interpréter aujourd’hui ?

Alors que je croyais exprimer la peur d’une ombre qui m’avait effrayé quelques mois auparavant, je n’ai à présent plus de doute sur la véritable identité de cette créature : L’araignée qui s’était une fois encore exprimée. En effet, s’il s’agissait d’une entitée, un mauvais esprit comme je le croyais, elle n’aurait pas incité l’artiste à extérioriser sa colère pour qu’une fois faite, elle l’enlace de sa bienveillance. De même que les mouvements de ma modèle Sorcha qui jouait ce personnage avec grâce, sont assez comparable à une arachnide. J’avais ressenti son énergie mais sans avoir conscience de son origine. 

Pourtant, ce tableau que j’avais peint “Pathos” qui représente une tache noire tourbillonnante au milieu d’un fond rouge, peut tout à fait représenter la marque de la veuve noire. Aujourd’hui je ne vois pas qu’une tâche, je vois aussi une toile d’araignée.

Alors, c’est avec émotion que j’arrive à comprendre son message.

Il est des douleurs bien trop difficiles à contenir qu’il faut pouvoir libérer. Je suis convaincue qu’il s’agit d’un soin que par intuition nous pouvons réaliser sur nous même. En ce qui me concerne c’est l’expression artistique qui m’a été d’un grand secours, peu importe sa forme, peu importe l’outil. 

Grâce à cette technique d’auto guérison dont j’ai mis un point final en exposant mes œuvres, cette blessure a pu se refermer. Et même si je ressens toujours son énergie avec émotion, je prends celle-ci comme le témoignage de mon expérience qu’il m’est essentiel de vous partager à travers mes mots. 

J’ai une immense gratitude pour Aranéisme et je ne remercierai jamais assez tous les acteurs de ce projet qui m’ont aidé à le réaliser (modèle, coiffeur, maquilleuse, assistant, vidéaste, galeriste). Je vous laisse en souvenir, quelques images du vernissage de l’exposition de 2014 à l’Imaginearium au Havre.

Facebook
Twitter
LinkedIn
Pinterest

4 réponses

  1. J’adore tout est clair en revoyant cette vidéo . Tout s’exprimait au travers de cette mise en scène … Magnifique moyen d’expression

  2. Que d’émotions en voyant ces images et en comprenant mieux ton cheminement ! Merci, ton témoignage m’aide à y voir plus clair en moi également. 😘

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Plus d'articles qui pourraient vous plaire